Cycle « Le genre au travail » : L’éthique du Care, des inégalités de genre à la relation de service


Intervenante : Fabienne Brugère, professeure de philosophie, Université de Paris 8 ; auteure de L’éthique du care, PUF, collection QSJ

Discutant : Sandro De Gasparo, ergonome, ATEMIS

L’éthique du care est la perspective d’une voix différente, c’est-à-dire une éthique contextuelle qui réhabilite la place des émotions et d’une rationalité ancrée dans l’affectivité. Elle constitue non seulement la possibilité d’une société pluraliste, mais aussi l’organisation d’une forme de résistance, la possibilité d’une transformation de la société. Dans ce sens, l’éthique du care peut servir de référence pour penser une transformation des relations humaines, plus à même de combiner le souci de soi et le souci des autres, de penser la notion de coopération, de rendre les relations de travail moins conflictuelles et de promouvoir, dans les organisations, des relations plus horizontales et la reconnaissance de la créativité de chacun.

Le genre occupe ici une place centrale, parce qu’il relève de la figure des relations de pouvoir sexuées. Le genre représente une forme de verticalité oppressive. Si on analyse cette forme spécifique d’oppression à travers les métiers de soin, qui sont généralement assignés à la féminité et accomplis par des femmes, on peut aboutir à la possibilité d’un déplacement des relations de pouvoir : entre hommes et femmes, entre métiers dits de production et métiers dits de la relation, entre des activités masculines mieux reconnues et des activités du service moins valorisées. Le genre permet de déplacer la perspective à partir de laquelle on qualifie le travail.

Le travail occupe une place particulière dans les sphères de vie. La pensée du care permet de prendre conscience que les questions éthiques et les questions politiques sont intimement liées. Nous sommes constamment confrontés, dans la vie politique, à des questions éthiques et à une attente de plus en plus forte d’éthique de la part de nos gouvernants. Or il est important de situer la question éthique comme étant ce qui vient en premier : le changement des manières de vivre, des manières d’être, des manières de travailler ensemble, à partir de décisions individuelles ou des relations entre les uns et les autres. Ces déterminations éthiques des manières de vire et d’être en relation peuvent alors dessiner une nouvelle politique. Elles peuvent conduire à de nouveaux dispositifs politiques, à de nouvelles institutions, à la fois publiques mais aussi liées à l’entreprise.

L’éthique est la question politique essentielle du XXIème siècle.

La conférence dans son intégralité